•         Éditeur en VO :  Doubleday                                       Éditeur en VF : L'Atalante

                   Paru le 7 juin 2012                                                Paru le 24 octobre 2013

                           128 pages                                                                   135 pages

                                                                                               Traduction : Patrick Couton

     

    Ce petit livre a été écrit comme pour un livre pour enfant d'époque, avec de nombreuses illustrations type gravures anciennes. Il se fait l'écho du livre Coup de tabac de l'auteur, où le fils de Sam Vimaire, le jeune Sam, lit avec passion des livres de son auteur favori, dont "Le monde du caca".

    L'histoire, assez courte, raconte une semaine de la vie de Geoffrey, un petit garçon de sept ou huit ans qui vient passer quelques jours chez sa grand-mère qui vit dans une belle propriété à Ankh-Morpork.

    Le petit garçon, en compagnie du petit chien qu'il vient de recevoir en cadeau, et sous l'aile de personnes variées, va passer de bonnes vacances en se passionnant pour toutes les déjections animales, se constituant une jolie collection !

    Ce livre est une grande réussite à plusieurs points de vue : le ton, le point de vue de l'enfant et le développement sérieux de l'élimination et de la valorisation des déchets naturels.

    J'ai particulièrement aimé la conviction de l'enfant que tout lui arrive par miracle, alors que le lecteur comprend à demi-mot comment la grand-mère, avec autant de discrétion que de compréhension des désirs enfantins, organise chacune des journées de Geoffrey afin que celles-ci répondent aux souhaits informulés de son petit-fils. Son acceptation de l'enthousiasme scientifique de Geoffrey à comprendre et connaître les mystères entourant l'élimination naturelle est particulièrement significative. Tout comme ses demandes répétées de lavage approfondi des mains !

     

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  • 12959951

     Éditeur en VO : Jo Fletcher Books

    Paru le 1 mars 2012

    400 pages 

     

    J'ai lu ce livre en aveugle, après avoir été littéralement emballée par "Le meilleur des mondes possibles" du même auteur, un roman SF d'une personnalité éblouissante.

    (sortez vos lunettes de soleil, il va pleuvoir des superlatifs)

    Très vite j'ai retrouvé la personnalité de l'auteur, son talent pour une écriture gra-cieuse, pleine de finesse, de générosité et de drôlerie.

    Le style est d'une pureté époustouflante dans sa sobriété, littéraire sans aucune pédanterie (on note parfois des mots en français, parfaitement orthographiés, un signe de perfectionnisme qui rencontre ma pleine approbation !) et absolument délicieux à lire, me laissant un sourire permanent aux lèvres.

    Il est bien difficile de glorifier un style brillant ; je vais ainsi, au fil de mon commentaire, vous gratifier de quelques citations qui m'ont ravie, vous saurez ainsi si ce livre étonnant est fait pour vous.

    Pour ma part, je me suis surprise à avoir envie d'écouter une version audio de ce roman, sans doute après avoir entendu le trailer du roman (ici). C'est un roman qu'on a envie de lire à haute voix, à des enfants en particulier, en y mettant le ton !

    La forme est étonnante pour un livre publié si récemment (2012) : une narration qui prend à témoin le lecteur (certains éléments en fin de livre nous laisse deviner qui peut être ce narrateur), un style délicieusement désuet parfois, une héroïne toutes en demi-teintes, en éclairages indirects, une ambiance de conte.

    L'ambiance et le style m'ont fortement évoqué des lectures classiques, en particulier "Les Histoires comme ça" de Kipling et, pour le ton, le roman d'Alice au Pays des merveilles (mais sans l'absurdité permanente - "Redemption in indigo" est une histoire très agréable à lire, avec un fil directeur bien net) ainsi que tous les romans de Jane Austen, d'une manière générale.

    Le plus extraordinaire dans ce roman est l'impossibilité à bien situer l'histoire, une impossibilité clairement volontaire, car parfaitement maîtrisée. Celle-ci se déroule - à l'exception de passages dont je ne vous révélerais pas la nature - en Afrique Noire, à une époque qui semble proche, mais dans une ambiance intemporelle. Le récit aurait pu s'ancrer sans doute partout dans le monde et n'importe quand.

    Seule l'importance des légendes et croyances, si parfaitement intégrées à la narra-tion et considérées comme réelles par les personnages, signe un cadre où la superstition semble remplacée par la conviction générale que les êtres surnaturels et les pouvoirs particuliers existent bien, tout simplement.

    Paama est le personnage central du livre, mais en toute discrétion.

    "Do not think badly of Paama. She had never had any experience of being and he-roine, and she was not accustomed to other wordly beings threatening her loved ones."

    Le personnage le plus haut en couleur (bleu, pour tout dire !) est un des "djombis" de l'histoire. Ces êtres surnaturels sont d'une nature subtile : un peu des démons, mais sans les connotations péjoratives, un peu des anges parfois déchus, parfois en voie de rédemption, parfois l'un après l'autre !

    Leur forme peut être variable, voire absurde. Le narrateur ne manque pas alors de nous remettre les idées en place, avec fermeté, comme à propos du "Trickster", un autre djombi :

    " 'Gentlemen, pardon me for eavesdroping'

    It was a spider. He was a handsome specimen, standing well over a metre tall at the shoulder, and he had a slight tendency to gesticulate upwards with his front legs that made appear taller. His eyes were keen and deep, and radiated sympa-thy".

    "I know your complaint already. You are saying, how do two grown man begin to see talking spiders after only three glasses of spice spirit? My answer is twofold. First, you have no idea how strong spice spirit is made in that region. Second, you have no idea how talking animals operate. Do you thing they would have survive long if they regularly made themselves known? For that matter, do you think and arachnid with mouthparts is capable of articulating the phrase 'I am a pawnbroker' in any known human langage? Think! These creatures do not truly talk, nor are they truly animals, but thet do encounter human folk, and when they do, they carefully take with them all memory of the meeting".

    L'entrée en matière est assurée par l'absurde et ridicule personnage d'Ansige, le mari goinfre que Paama a laissé derrière elle pour rentrer dans son village natal, mais sans jamais s’appesantir sur sa situation, refusant de satisfaire la curiosité des villageois.

    "There was something else about Paama that distracted people's attention from any potentially juicy tidbits of her past. She could cook."

    Le pauvre Ansige, moteur de l'intrigue, victime de ses appétits, est aussi pitoyable que réjouissant :

    "There are people who inspire others to reach lofty goals. Ansige was one of those. People got to know him, and it came to them in a flash of revelation that whatever it was that they wanted to be, it was not a man like Ansige, and they scrambled to occupy the opposite end of the accomplishment spectrum. People have heroes whom they imitate; Ansige was the perfect anti-hero. No one wanted to turn like him".

    "What else could she [Ansige's mother] have done ? It is a heavy burden, as Paama's parents had found out, to find a worthy spouse for one's offspring, but how much harder the task and heavier the burden when not even love can hide from a doting mother's eyes the sad fact of her son's utter ineligibility!"

    Cette dernière citation en particulier montre des accents Austiniens très amusants, d'autant plus que le lecteur comprend rapidement que dans ce monde matriarcal, il est admissible qu'une femme quitte son mari pour revenir chez ses parents, la tête haute.

    Voilà pour l'ambiance, les thème de départ. Ce n'est qu'à la toute fin que j'ai compris où nous avait amené l'auteur, cette coquine ! Je ne vous résumerais pas l'histoire, ce serait gâcher votre plaisir de lecture. Sachez seulement que c'est brillant et étonnant de bout en bout, un conte plein de verve et de vie, qui a la carrure d'un classique qu'il mériterait de devenir... J'espère qu'il sera traduit, il le mérite mille fois et nous aussi !

    "'Typical', Chance said in tones of deep depression. 'Give them a crisis and they must turn in a form of entertainment'"

    "'This will be entertaining?' she asked doubtfully

    'Some humans find it so. There will be no death, I promise you, but there will be severe embarrassment, which is but a small death of the ego'".

     

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  • 20561643Couverture de Le Théorème du Homard, Ou comment trouver la femme idéale

         Éditeur en VO :   Michael Joseph                                  Éditeur en VF : Nil

                   Paru le 11 avril 2013                                           Paru le 13 mars 2014

                           304 pages                                                               408 pages

                                                                                          Traduction : Odile Demange

     

    J'ai adoré ce livre, que j'ai lu presque d'une traite et que je relirai avec beaucoup de plaisir.

    C'est d'abord une lecture très drôle, délicieusement cocasse, que l'on imaginerait très bien en excellent film (et tout aussi bien en bouse monumentale, hélas, s'il tombait dans de mauvaises mains). Mais c'est aussi un sujet de fond moderne, celui de la reconnaissance, puis de l'acceptation des différences. Une leçon toute en légèreté sur la notion de la normalité : les gens normaux sont-ils forcément ceux qui sont les plus nombreux à fonctionner de la même manière ?

    Le récit se classe comme une comédie romantique, mais sans céder aux diktats du genre ni jamais sombrer dans la caricature.

    L'élan romanesque m'a également évoqué tous ces récits et histoires d'enfants sauvages, ou de personnes parachutées dans un monde qui leur est complètement étranger, et qui doivent utiliser leur intelligence pour comprendre et se faire comprendre - avec tous les quiproquos et situations burlesques que cela peut entraîner (dans un registre positif bien entendu).

    Le personnage principal est très atypique. Brillant célibataire d'une quarantaine d'an-nées, spécialisé en génétique, Don mène une carrière universitaire exemplaire, à peine invalidée par les difficultés de celui-ci à comprendre les nuances des règles qu'il à tendance à prendre au pied de la lettre. D'un point de vue social, c'est plus difficile, malgré ses efforts. Les autres sont si bizarres, si difficiles à comprendre, à appréhender ! Pour-tant Don essaie sans se décourager, et chérit ses rares amis.

    L'entrée en matière, par une scène délicieusement loufoque, nous donne la clé de la personnalité de Don, alors qu'il donne, pour dépanner un ami, une conférence à des parents d'enfants présentant le syndrome d'Asperger.

    Tout s'explique !

    Enfin, pas immédiatement, mais à travers les rebondissements du récit, alors que Don met à exécution son idée de génie : trouver la femme idéale à travers un questionnaire détaillé.

    L'auteur réussit un exploit, celui de nous rendre infiniment attachant une personne qui sait pourtant si mal, de nature, exprimer l'ensemble des émotions humaines et les déchiffrer chez autrui. Un homme d'une intelligence exceptionnelle, mais aussi très seul et d'une innocence quasi enfantine. A la fois infiniment capable et complètement désarmé.

    D'abord par la logique : vue de l'intérieur, les arguments de Don, pour expliquer comment il organise sa vie (temps hebdomadaire de nettoyage de la salle de bains chronométré), choisit ses vêtements (veste de sport parfaitement adaptée : au travail, aux courses, aux sorties, aux voyages), calcule ses calories alimentaires (en reportant éventuellement les excès d'un jour) sont parfaitement raisonnables.

    Bien sûr, le monde extérieur n'est pas de cet avis et les situations délirantes s'enchaînent.

    Et pourtant, à travers les yeux de Don, la superficialité des conversations mondaines, l'obligation des situations sociales, l'acceptation aveugle des lieux communs nous sautent aux yeux.

    Dans ce roman la personne avec laquelle on aimerait discuter est bien le personnage principal, qui s'intéresse à tout, d'une manière très littérale, shuntant allègrement le superflu !

    Le deuxième effet séduction est que Don essaie si fort que le lecteur s'en retrouve bien humble. Sous prétexte que Don est "hors norme", c'est à lui de faire des efforts considérables pour s'adapter, contre toute logique, s’escrimant à comprendre le comportement aberrant des autres. Ses efforts ne sont pas toujours vains et Don entretient des amitiés, souvent atypiques et toujours rares. Un moment très touchant du livre nous fait part de ses pensées alors que la jeune femme qui l'accompagne vient de réfuter avec désinvolture qu'ils puissent former un couple, en remarquant à la tierce personne que Don n'est "qu'un ami". Don se trouve très heureux de cette déclaration, retenant seulement qu'elle le tienne pour un ami - lui qui compte les siens sur les doigts de la main !

    Le troisième effet séduction est l'effet show off : Don est d'une intelligence supérieure, possède des capacités de concentration, de mémorisation et de volonté hors norme. Et quand il s'attelle à un projet, que ce soit son "Projet Épouse" ou plus tard son "Projet Père", il ne recule devant aucun effort, aucun sacrifice et fonce !

    Le récit semble être une étrange romance, ou non-romance, alors que Don rencontre une (très belle) jeune femme, qui lui semble aussi normale/anormale que les autres, mais qui nous apparaît très vite assez perturbée, en colère, mal dans sa peau.

    D'une manière générale l'une des forces de ce roman, fluide et drôle, est la manière très subtile dont les personnages nous sont présentés à travers les yeux de Don. Procédé courant soit, mais qui prend toute sa force quand le personnage principal possède un profil psychologique décalé. On comprend très bien la logique des actes et des pensées de Don, on devine très vite qui il est et ce qu'il recherche. En revanche le doute persiste longtemps pour les quelques autres personnages qui gravitent autour de lui, dont on ne perçoit que le reflet, à travers le miroir déformé - pour nous, là encore - de son point de vue.

    Bien des caractéristiques fondamentales d'un interlocuteur (attraits physiques, âge, situation socio-économique) qui auraient été présentées d'emblée dans un récit classique, n'apparaissent que très tardivement : l'essentiel pour Don, sont les capacités de conversation "vraie", les centres d'intérêt, le goût pour la discussion de l'autre. Le reste est réellement, à ses yeux, secondaire. Enfin, Don se concentre quand même sur le physique... à travers l'IMC de la personne, qu'il calcule systématiquement, au jugé !

    L'auteur (un Australien, décidément il y a des perles de romanciers de ce pays !) arrive à un exploit : faire rire sur un sujet très sérieux sans jamais le galvauder, avec une histoire rythmée et bien tournée, en mettant en scène une personne hors norme, avec beaucoup de drôlerie et de générosité mais aussi une rigueur sans faille.

    De brillants récits sur des personnalités autres existent, bien sûr ("La vitesse de l'obscurité" d'Élizabeth Moon, "Des fleurs pour Algernon" de Daniel Keyes) mais sont des récits graves, voire tragiques.

    Rien de tel ici ; car si l'histoire de Don est presque douloureuse parfois, l'ensemble est léger, positif et... a son happy ending !

    (remarque : un film est bien prévu, l'auteur s'est attelé à l'écriture du scénario - ce qui est de bon augure ! Une suite va également paraître, dès septembre en Australie, "The Rosie Effect". Là, je suis un peu plus dubitative... ce qui ne m'empêchera pas de me jeter sur le livre, bien entendu ^_^)

     

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  • Couverture : Nos Étoiles Contraires11870085

                 Éditeur en VO : Dutton                                        Éditeur en VF : Nathan

                  Paru le 10 janvier 2012                                        Paru le 21 février 2013

                            336 pages                                                               330 pages

                                                                                          Traduction : Catherine Gibert

     

    "Nos étoiles contraires" rencontre un succès prodigieux, en particulier auprès des jeunes lecteurs, et je ne voulais pas passer à côté d’un tel enthousiaste, malgré mon peu d’attrait, a priori, pour un thème aussi dé-primant, qui reflète une réalité si présente autour de nous.

    Pourquoi raconter une telle histoire ? Pourquoi raconter quelques mois de l'exis-tence d'une jeune fille condamnée à court terme ? (ce n'est pas un spoiler, les choses sont claires d'emblée, Hazel est en rémission miraculeuse, son cancer n'attend que la moindre occasion pour bondir à l’assaut de son corps et la submerger).

    Eh bien sans doute parce que ce roman, dans son existence et sa personnalité, est une parfaite métaphore d'une personne atteinte d'un cancer : la maladie ne devrait jamais définir une personne malade de A à Z. Une personne très malade, mourante même, devrait avoir le droit de rester elle-même, avec ses défauts, ses qualités, ses opinions, ses projets, ses décisions - et ceci même si la maladie régit le moindre de ses moments. Ce roman, qui raconte la rencontre de deux jeunes gens malades d'un cancer, est bien plus qu'un roman sur le thème de la maladie : c'est une vraie histoire, qui existe par ce thème mais aussi bien au-delà.

    Cette histoire, écrite à la première personne du singulier par une jeune fille de 16 ans (l'auteur disparaît complètement, une prouesse) est brillante, drôle, délicieuse, généreusement et terriblement émouvante.

    C'est aussi un récit méticuleusement réaliste : aucun cliché, aucun lieu commun et une immersion que je n'ai peut-être jamais encore rencontré à un tel niveau dans aucune de mes lectures (le parallèle le plus fort qui m'est venu à la lecture de ce roman, en manière de ressenti, est la visualisation du reportage de Terry Prattchet sur l'euthanasie).

    La tonalité du récit est néanmoins extrêmement proche de celui de "Morwenna" de Joe Walton, un roman que je conseille à tous ceux qui ont tombés amoureux de l’âme si pure d’Hazel, son pragmatisme, son humour, son esprit acéré.

    L’un des nombreux atouts du roman tient dans le fait que les affres des premiers temps ne nous sont pas contées. L’horreur, l’incrédulité, le déni, la colère, le senti-ment d’injustice, d’incompréhension – tout ça a déjà intégré par Hazel et ses proches. Désormais la situation est, tout simplement ; dans sa cruauté et son iné-luctabilité. Sans être pour autant résignée, chaque personne de ce roman sait à quoi s’en tenir et tâche, avec plus ou moins de succès, de vivre cette réalité inte-nable, avec son quotidien misérable mais pourtant si précieux. Hazel est jeune fille exceptionnelle, d’une intelligence supérieure à la normale, d’une lucidité et d’une générosité exceptionnelles, mais aussi une simple jeune fille de 16 ans.

    L'éclairage de l'entourage à travers les yeux d’Hazel, en particulier de ses parents, est tout simplement remarquable.

    J'ai beaucoup apprécié l’humour et la lucidité de l'histoire dans l'histoire, alors que la jeune fille se passionne pour un roman écrit par une jeune elle aussi atteinte d'un cancer (roman écrit par un homme adulte), cher-chant désespérément à joindre l’auteur pour savoir ce qu’il advient des personnages ensuite. Le traitement et le rapport à l'auteur (qui n’est idéalisé en rien !) sont étonnants.

    D'une manière générale cette histoire, pourtant si terriblement triste et désespérée, nous fait souvent rire aux éclats : une prouesse et une dé-monstration...

    La relation entre Hazel et Augustus est pleine d'une maturité hors d’âge mais aussi de la fraîcheur de leur âge ; elle est illuminée par leur intelligence hors norme, leur humour délicieux, souvent bien noir, leurs personnalités si poignantes. Cette histoire d’amour éphémère mais d’une sincérité et d’une maturité étonnantes, sans une once de mièvrerie ni le moindre stéréotype, atteint la perfection.

    Les idées, nombreuses et passionnantes, développées par ces deux jeunes personnes confrontées si injustement tôt à la mort, sont intrigantes, riches et traitant de thèmes qui nous ne peuvent manquer de toucher le lecteur, lui-même condamné à mort dès son premier souffle. Aucun remplissage, un texte dense dans sa simplicité.

    Cette lecture, malgré ses attraits et ses qualités littéraires (c’est un vrai page-turner, une lecture limpide) a été particulièrement éprouvante ; on pourrait ainsi s'interroger sur la pertinence à s’immerger ainsi dans une histoire, aussi remar-quable soit-elle, si le prix à payer est d'être aussi profondément bouleversé et per-turbé à la fin du roman.

    La réponse est sans doute dans le thème même du roman : Vaut-il mieux ne rien vivre, ne s'attacher à rien et ne s'intéresser à rien puisque l'on va tout perdre à la fin, ou profiter de tout, au mieux, chaque instant, puisque chaque instant pourrait bien être le dernier ?...

     

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  • 16002459

        Éditeur en VO :  Subterranean Press                    Éditeur en VF : Livre de Poche

                    (Édition : Deluxe)                                           Traduction : Mélanie Fazi

                 Paru le  31 août 2012                                             Paru le 12 mars 2014          

                           96 pages                                                                   96 pages

     

    "Mon nom est Stephen Leeds et je suis parfaitement sain d'esprit. Mes hallucina-tions, en revanche, sont complètement cinglées".

    Voilà comment embraye cette courte histoire, nous présentant sans délai le personnage principal, un homme qui s'estime tout à fait ordinaire, mis à part une bonne dose de sens pratique, qui lui a permis de faire fructifier - son don/sa malédiction/sa maladie ? - de belle façon, lui permettant de vivre dans une belle maison aux 46 chambres.

    Ces chambres sont toutes occupées. Ou pas. C'est selon le point de vue en fait ! De celui de Stephen, chacune des chambres de sa maison accueille l'une de ses halluci-nations ('aspects') avec lesquelles il entretient d’excellents rapports, courtois et professionnels. Ses 'aspects' interfèrent entre eux, avec toutes les apparences de la normalité de personnages de romans, et participent au déroulement de l'intrigue du récit. Ils sont ainsi aussi réels à nos yeux qu'à ceux de Stephen, qui pourtant semble être aux yeux du monde un fou, un génie, une sorte d'anomalie magique ou même un affabulateur.

    Stephen vit seul avec son flegmatique majordome, ou alors vit avec son flegmatique majordome et une quantité d'amis aux caractères, origines, tempéraments et aptitudes variés.

    Quelle que soit la nature réelle de cet homme, pourvu d'une anomalie incroyable qui passionne le monde scientifique, les aptitudes de Stephen sont recherchées par de nombreuses personnes et parfois accordées, moyennant finances. C'est ainsi que se déroule l'histoire, de type enquête mâtinée d'action, où Stephen entraine une poignée choisie de ses 'aspects', quitte à en créer un nouveau en cas de besoin.

    L'histoire se dénoue bien, de façon satisfaisante, mais ce n'est pas elle qui a soulevé mon enthousiasme, mais bien le personnage de Stephen escorté de sa horde (il est surnommé, bien malgré lui, "Legion"). Le contraste entre la vue de l'intérieur et celle de l'extérieur est excessivement bien exploité, pour un effet aussi passionnant que drôle. Stephen (le récit est à la première personne du singulier, c'est important) note régulièrement l'effet qu'a son comportement - parler dans le vide, demander des sièges pour ses 'aspects', de l'eau invisible, etc. - déplorant d'ailleurs souvent la réaction négative, voire même dégoûtée, de ses interlocuteurs...

    Ce qui est passionnant dans cette idée, c'est que le cas de Stephen parait être, d'un point de vue médical, un état de schizophrénie atypique, avec la présence perma-nente des différentes personnalités, laissant un personnage principal très neutre, commun même. Stephen a sans cesse recourt à ses 'aspects' pour résoudre toutes sortes de problèmes, répondre à toutes sortes de questions, et se conduit comme un homme d'affaire bien entouré, qui sait gérer ses ressources humaines. Bien sûr, de l'extérieur, il peut paraître comme un charlatan super bien rôdé, ou alors comme un génie sans précédent !

    Brandon Sanderson a déjà montré à plusieurs reprises à quel point il était malicieux, et ce livre en est un bon exemple. C'est souvent très drôle, par des mises en scènes, ou par des allusions (le coup dans l'avion avec l’hébreu, qui rappellera quelque chose aux lecteurs du "Nom du vent" de Rothfuss), le personnage caricatural du fanatique garde du corps, le clin d’œil aux clichés de la romance, etc.

    Et, bien sûr, on devine l'amusement d'un auteur, pour qui ses personnages, qui vivent sous sa plume, ont autant de présence et d'existence réelles que les 'aspects' de Stephen pour ce dernier - en étant pourtant des personnages imaginaires, que personne ne verra jamais "en vrai"...

    Malgré le ton allègre et plutôt léger, les bases sont solides et le ton très crédible, permettant une immersion parfaite et un intérêt de lecture constant de la première à la dernière ligne. Je n'ai noté qu'une petite faute de scripte, et seulement sans doute parce que je suis maniaque.

    J'ose espérer une suite, un fil de la narration laissé traîner semble aller dans ce sens. Et ce serait bien dommage de ne pas exploiter plus cette équipe de choc ! Heureusement Brandon Sanderson semble aimer le travail acharné, et dédaigner le sommeil, le golf et les longues séances de méditation improductives.

    C'est bien ! Qu'il continue comme ça !!

     

                                                                                 

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