• "Nos étoiles contraires" de John Green

    Couverture : Nos Étoiles Contraires11870085

                 Éditeur en VO : Dutton                                        Éditeur en VF : Nathan

                  Paru le 10 janvier 2012                                        Paru le 21 février 2013

                            336 pages                                                               330 pages

                                                                                          Traduction : Catherine Gibert

     

    "Nos étoiles contraires" rencontre un succès prodigieux, en particulier auprès des jeunes lecteurs, et je ne voulais pas passer à côté d’un tel enthousiaste, malgré mon peu d’attrait, a priori, pour un thème aussi dé-primant, qui reflète une réalité si présente autour de nous.

    Pourquoi raconter une telle histoire ? Pourquoi raconter quelques mois de l'exis-tence d'une jeune fille condamnée à court terme ? (ce n'est pas un spoiler, les choses sont claires d'emblée, Hazel est en rémission miraculeuse, son cancer n'attend que la moindre occasion pour bondir à l’assaut de son corps et la submerger).

    Eh bien sans doute parce que ce roman, dans son existence et sa personnalité, est une parfaite métaphore d'une personne atteinte d'un cancer : la maladie ne devrait jamais définir une personne malade de A à Z. Une personne très malade, mourante même, devrait avoir le droit de rester elle-même, avec ses défauts, ses qualités, ses opinions, ses projets, ses décisions - et ceci même si la maladie régit le moindre de ses moments. Ce roman, qui raconte la rencontre de deux jeunes gens malades d'un cancer, est bien plus qu'un roman sur le thème de la maladie : c'est une vraie histoire, qui existe par ce thème mais aussi bien au-delà.

    Cette histoire, écrite à la première personne du singulier par une jeune fille de 16 ans (l'auteur disparaît complètement, une prouesse) est brillante, drôle, délicieuse, généreusement et terriblement émouvante.

    C'est aussi un récit méticuleusement réaliste : aucun cliché, aucun lieu commun et une immersion que je n'ai peut-être jamais encore rencontré à un tel niveau dans aucune de mes lectures (le parallèle le plus fort qui m'est venu à la lecture de ce roman, en manière de ressenti, est la visualisation du reportage de Terry Prattchet sur l'euthanasie).

    La tonalité du récit est néanmoins extrêmement proche de celui de "Morwenna" de Joe Walton, un roman que je conseille à tous ceux qui ont tombés amoureux de l’âme si pure d’Hazel, son pragmatisme, son humour, son esprit acéré.

    L’un des nombreux atouts du roman tient dans le fait que les affres des premiers temps ne nous sont pas contées. L’horreur, l’incrédulité, le déni, la colère, le senti-ment d’injustice, d’incompréhension – tout ça a déjà intégré par Hazel et ses proches. Désormais la situation est, tout simplement ; dans sa cruauté et son iné-luctabilité. Sans être pour autant résignée, chaque personne de ce roman sait à quoi s’en tenir et tâche, avec plus ou moins de succès, de vivre cette réalité inte-nable, avec son quotidien misérable mais pourtant si précieux. Hazel est jeune fille exceptionnelle, d’une intelligence supérieure à la normale, d’une lucidité et d’une générosité exceptionnelles, mais aussi une simple jeune fille de 16 ans.

    L'éclairage de l'entourage à travers les yeux d’Hazel, en particulier de ses parents, est tout simplement remarquable.

    J'ai beaucoup apprécié l’humour et la lucidité de l'histoire dans l'histoire, alors que la jeune fille se passionne pour un roman écrit par une jeune elle aussi atteinte d'un cancer (roman écrit par un homme adulte), cher-chant désespérément à joindre l’auteur pour savoir ce qu’il advient des personnages ensuite. Le traitement et le rapport à l'auteur (qui n’est idéalisé en rien !) sont étonnants.

    D'une manière générale cette histoire, pourtant si terriblement triste et désespérée, nous fait souvent rire aux éclats : une prouesse et une dé-monstration...

    La relation entre Hazel et Augustus est pleine d'une maturité hors d’âge mais aussi de la fraîcheur de leur âge ; elle est illuminée par leur intelligence hors norme, leur humour délicieux, souvent bien noir, leurs personnalités si poignantes. Cette histoire d’amour éphémère mais d’une sincérité et d’une maturité étonnantes, sans une once de mièvrerie ni le moindre stéréotype, atteint la perfection.

    Les idées, nombreuses et passionnantes, développées par ces deux jeunes personnes confrontées si injustement tôt à la mort, sont intrigantes, riches et traitant de thèmes qui nous ne peuvent manquer de toucher le lecteur, lui-même condamné à mort dès son premier souffle. Aucun remplissage, un texte dense dans sa simplicité.

    Cette lecture, malgré ses attraits et ses qualités littéraires (c’est un vrai page-turner, une lecture limpide) a été particulièrement éprouvante ; on pourrait ainsi s'interroger sur la pertinence à s’immerger ainsi dans une histoire, aussi remar-quable soit-elle, si le prix à payer est d'être aussi profondément bouleversé et per-turbé à la fin du roman.

    La réponse est sans doute dans le thème même du roman : Vaut-il mieux ne rien vivre, ne s'attacher à rien et ne s'intéresser à rien puisque l'on va tout perdre à la fin, ou profiter de tout, au mieux, chaque instant, puisque chaque instant pourrait bien être le dernier ?...

     

    Partager via GmailGoogle Bookmarks

    Tags Tags : , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :