• Couverture : Nos Étoiles Contraires11870085

                 Éditeur en VO : Dutton                                        Éditeur en VF : Nathan

                  Paru le 10 janvier 2012                                        Paru le 21 février 2013

                            336 pages                                                               330 pages

                                                                                          Traduction : Catherine Gibert

     

    "Nos étoiles contraires" rencontre un succès prodigieux, en particulier auprès des jeunes lecteurs, et je ne voulais pas passer à côté d’un tel enthousiaste, malgré mon peu d’attrait, a priori, pour un thème aussi dé-primant, qui reflète une réalité si présente autour de nous.

    Pourquoi raconter une telle histoire ? Pourquoi raconter quelques mois de l'exis-tence d'une jeune fille condamnée à court terme ? (ce n'est pas un spoiler, les choses sont claires d'emblée, Hazel est en rémission miraculeuse, son cancer n'attend que la moindre occasion pour bondir à l’assaut de son corps et la submerger).

    Eh bien sans doute parce que ce roman, dans son existence et sa personnalité, est une parfaite métaphore d'une personne atteinte d'un cancer : la maladie ne devrait jamais définir une personne malade de A à Z. Une personne très malade, mourante même, devrait avoir le droit de rester elle-même, avec ses défauts, ses qualités, ses opinions, ses projets, ses décisions - et ceci même si la maladie régit le moindre de ses moments. Ce roman, qui raconte la rencontre de deux jeunes gens malades d'un cancer, est bien plus qu'un roman sur le thème de la maladie : c'est une vraie histoire, qui existe par ce thème mais aussi bien au-delà.

    Cette histoire, écrite à la première personne du singulier par une jeune fille de 16 ans (l'auteur disparaît complètement, une prouesse) est brillante, drôle, délicieuse, généreusement et terriblement émouvante.

    C'est aussi un récit méticuleusement réaliste : aucun cliché, aucun lieu commun et une immersion que je n'ai peut-être jamais encore rencontré à un tel niveau dans aucune de mes lectures (le parallèle le plus fort qui m'est venu à la lecture de ce roman, en manière de ressenti, est la visualisation du reportage de Terry Prattchet sur l'euthanasie).

    La tonalité du récit est néanmoins extrêmement proche de celui de "Morwenna" de Joe Walton, un roman que je conseille à tous ceux qui ont tombés amoureux de l’âme si pure d’Hazel, son pragmatisme, son humour, son esprit acéré.

    L’un des nombreux atouts du roman tient dans le fait que les affres des premiers temps ne nous sont pas contées. L’horreur, l’incrédulité, le déni, la colère, le senti-ment d’injustice, d’incompréhension – tout ça a déjà intégré par Hazel et ses proches. Désormais la situation est, tout simplement ; dans sa cruauté et son iné-luctabilité. Sans être pour autant résignée, chaque personne de ce roman sait à quoi s’en tenir et tâche, avec plus ou moins de succès, de vivre cette réalité inte-nable, avec son quotidien misérable mais pourtant si précieux. Hazel est jeune fille exceptionnelle, d’une intelligence supérieure à la normale, d’une lucidité et d’une générosité exceptionnelles, mais aussi une simple jeune fille de 16 ans.

    L'éclairage de l'entourage à travers les yeux d’Hazel, en particulier de ses parents, est tout simplement remarquable.

    J'ai beaucoup apprécié l’humour et la lucidité de l'histoire dans l'histoire, alors que la jeune fille se passionne pour un roman écrit par une jeune elle aussi atteinte d'un cancer (roman écrit par un homme adulte), cher-chant désespérément à joindre l’auteur pour savoir ce qu’il advient des personnages ensuite. Le traitement et le rapport à l'auteur (qui n’est idéalisé en rien !) sont étonnants.

    D'une manière générale cette histoire, pourtant si terriblement triste et désespérée, nous fait souvent rire aux éclats : une prouesse et une dé-monstration...

    La relation entre Hazel et Augustus est pleine d'une maturité hors d’âge mais aussi de la fraîcheur de leur âge ; elle est illuminée par leur intelligence hors norme, leur humour délicieux, souvent bien noir, leurs personnalités si poignantes. Cette histoire d’amour éphémère mais d’une sincérité et d’une maturité étonnantes, sans une once de mièvrerie ni le moindre stéréotype, atteint la perfection.

    Les idées, nombreuses et passionnantes, développées par ces deux jeunes personnes confrontées si injustement tôt à la mort, sont intrigantes, riches et traitant de thèmes qui nous ne peuvent manquer de toucher le lecteur, lui-même condamné à mort dès son premier souffle. Aucun remplissage, un texte dense dans sa simplicité.

    Cette lecture, malgré ses attraits et ses qualités littéraires (c’est un vrai page-turner, une lecture limpide) a été particulièrement éprouvante ; on pourrait ainsi s'interroger sur la pertinence à s’immerger ainsi dans une histoire, aussi remar-quable soit-elle, si le prix à payer est d'être aussi profondément bouleversé et per-turbé à la fin du roman.

    La réponse est sans doute dans le thème même du roman : Vaut-il mieux ne rien vivre, ne s'attacher à rien et ne s'intéresser à rien puisque l'on va tout perdre à la fin, ou profiter de tout, au mieux, chaque instant, puisque chaque instant pourrait bien être le dernier ?...

     

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  • 16002459

        Éditeur en VO :  Subterranean Press                    Éditeur en VF : Livre de Poche

                    (Édition : Deluxe)                                           Traduction : Mélanie Fazi

                 Paru le  31 août 2012                                             Paru le 12 mars 2014          

                           96 pages                                                                   96 pages

     

    "Mon nom est Stephen Leeds et je suis parfaitement sain d'esprit. Mes hallucina-tions, en revanche, sont complètement cinglées".

    Voilà comment embraye cette courte histoire, nous présentant sans délai le personnage principal, un homme qui s'estime tout à fait ordinaire, mis à part une bonne dose de sens pratique, qui lui a permis de faire fructifier - son don/sa malédiction/sa maladie ? - de belle façon, lui permettant de vivre dans une belle maison aux 46 chambres.

    Ces chambres sont toutes occupées. Ou pas. C'est selon le point de vue en fait ! De celui de Stephen, chacune des chambres de sa maison accueille l'une de ses halluci-nations ('aspects') avec lesquelles il entretient d’excellents rapports, courtois et professionnels. Ses 'aspects' interfèrent entre eux, avec toutes les apparences de la normalité de personnages de romans, et participent au déroulement de l'intrigue du récit. Ils sont ainsi aussi réels à nos yeux qu'à ceux de Stephen, qui pourtant semble être aux yeux du monde un fou, un génie, une sorte d'anomalie magique ou même un affabulateur.

    Stephen vit seul avec son flegmatique majordome, ou alors vit avec son flegmatique majordome et une quantité d'amis aux caractères, origines, tempéraments et aptitudes variés.

    Quelle que soit la nature réelle de cet homme, pourvu d'une anomalie incroyable qui passionne le monde scientifique, les aptitudes de Stephen sont recherchées par de nombreuses personnes et parfois accordées, moyennant finances. C'est ainsi que se déroule l'histoire, de type enquête mâtinée d'action, où Stephen entraine une poignée choisie de ses 'aspects', quitte à en créer un nouveau en cas de besoin.

    L'histoire se dénoue bien, de façon satisfaisante, mais ce n'est pas elle qui a soulevé mon enthousiasme, mais bien le personnage de Stephen escorté de sa horde (il est surnommé, bien malgré lui, "Legion"). Le contraste entre la vue de l'intérieur et celle de l'extérieur est excessivement bien exploité, pour un effet aussi passionnant que drôle. Stephen (le récit est à la première personne du singulier, c'est important) note régulièrement l'effet qu'a son comportement - parler dans le vide, demander des sièges pour ses 'aspects', de l'eau invisible, etc. - déplorant d'ailleurs souvent la réaction négative, voire même dégoûtée, de ses interlocuteurs...

    Ce qui est passionnant dans cette idée, c'est que le cas de Stephen parait être, d'un point de vue médical, un état de schizophrénie atypique, avec la présence perma-nente des différentes personnalités, laissant un personnage principal très neutre, commun même. Stephen a sans cesse recourt à ses 'aspects' pour résoudre toutes sortes de problèmes, répondre à toutes sortes de questions, et se conduit comme un homme d'affaire bien entouré, qui sait gérer ses ressources humaines. Bien sûr, de l'extérieur, il peut paraître comme un charlatan super bien rôdé, ou alors comme un génie sans précédent !

    Brandon Sanderson a déjà montré à plusieurs reprises à quel point il était malicieux, et ce livre en est un bon exemple. C'est souvent très drôle, par des mises en scènes, ou par des allusions (le coup dans l'avion avec l’hébreu, qui rappellera quelque chose aux lecteurs du "Nom du vent" de Rothfuss), le personnage caricatural du fanatique garde du corps, le clin d’œil aux clichés de la romance, etc.

    Et, bien sûr, on devine l'amusement d'un auteur, pour qui ses personnages, qui vivent sous sa plume, ont autant de présence et d'existence réelles que les 'aspects' de Stephen pour ce dernier - en étant pourtant des personnages imaginaires, que personne ne verra jamais "en vrai"...

    Malgré le ton allègre et plutôt léger, les bases sont solides et le ton très crédible, permettant une immersion parfaite et un intérêt de lecture constant de la première à la dernière ligne. Je n'ai noté qu'une petite faute de scripte, et seulement sans doute parce que je suis maniaque.

    J'ose espérer une suite, un fil de la narration laissé traîner semble aller dans ce sens. Et ce serait bien dommage de ne pas exploiter plus cette équipe de choc ! Heureusement Brandon Sanderson semble aimer le travail acharné, et dédaigner le sommeil, le golf et les longues séances de méditation improductives.

    C'est bien ! Qu'il continue comme ça !!

     

                                                                                 

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  • 7113498Les Chevaux célestes

                    Éditeur en VO : Roc                                  Éditeur en VF : L'Atalante

                   Paru le 27 avril 2010                                       Paru le 19 juin 2014

                            573 pages                                                         656 pages

                                                                                       Traduction : Mikael Cabon

     

    "Les Chevaux Célestes" n'appartient pas au domaine de la fantasy, mais plutôt à celui de la "variation historique". Le contexte d'une Chine Impériale d'il y a mille cinq cent ans ans m'a semblé très crédible, malgré mon manque totale de connaissances sur cette période dans cette partie du monde. Ce roman, aux grandes qualités littéraires, fera le bonheur des bons lecteurs, toutes générations confondues, qu'ils soient férus d'Histoire ou tout simplement de bonnes histoires...

    L'ambiance n'est pas celle d'une épopée gigantesque, elle reste très intime, très introspective, sans nuire au rythme de la narration, qui est excellent. Le personnage principal, Shen Tai, est un jeune homme paisible et réfléchi, dont le tempérament se heurte régulièrement au poids des traditions, de son éducation, son enfance, sa famille... Son parcours classique de jeune homme de bonne famille est parfois ponctué d'une décision étonnante, voire même spectaculaire. C'est ainsi qu'il choisit, à ses risques et périls, d'honorer la mémoire de son père en transformant la période de confinement de deuil en une mission de dévouement inimaginable aux yeux de tous.

    Cette décision - de porter secours aux âmes des morts du dernier champ de bataille, qu'elles soient de son peuple ou de l'ancien ennemi - loin de l'exposer à l'opprobre et au châtiment, lui gagne l'admiration sans borne de tous.

    Une princesse de son pays, exilée par le mariage en terre si récemment ennemie, l'honore d'un cadeau qui défie l'imagination, 250 chevaux rarissimes, d'une valeur incroyable.

    Ce cadeau inespéré et démesuré arrache définitivement Tai à son relatif anonymat et l'expose aux turpitudes du monde politique, auxquelles il aurait, sans doute, préféré échapper...

    Dès lors, il doit utiliser son intelligence et les amitiés qui s'offrent à lui de façon souvent inespérée, pour rester vivant, tout simplement. Car tous les puissants dardent un regard concupiscent sur cette horde d'animaux mythiques, la vie du jeune homme n'ayant plus de poids qu'à leur regard.

    Le récit se déroule avec une lenteur pleine de finesse et de réflexions. Malgré le thème épique, la grande majorité du récit ne cible à chaque fois qu'une poignée de personnages : Tai la plupart du temps, mais aussi sa sœur, Li-Mei, au destin contrarié, les puissants de ce monde impérial, et aussi quelques personnages tertiaires, qui donnent une note originale à la trame.

    L'action ne survient vraiment qu'en fin de livre, après un déroulement tout en douceur que je n'attendais pas de ce livre, étant donné le thème de départ.

    L'ambiance est en accord avec la volonté de la presque totalité des personnages de vivre leur vie selon des principes d'harmonie et de traditions, s'épanouissant dans la musique et la poésie. La violence qui surgit parfois n'en est que plus choquante.

    Un importance particulière est accordée à la place des femmes dans cette histoire, mais uniquement celles qui bénéficient de la douteuse bénédiction d'être belles, jeunes et pour certaines, bien-nées.

    Cette aveuglement au sort des autres femmes, si nombreuses, et la fascination pour la séduction - autant naturelle qu'acquise - des beautés de ce récit m'a semblé curieusement naïf. Tai (et l'auteur peut-être également, je me suis posée la question) semble idéaliser la position des courtisanes, alors même que toutes les obligations de leur servitude sont exposées avec délicatesse et empathie.

    J'ai beaucoup aimé ce livre lors de ma première lecture en VO, voici quatre ans, mais je ne l'avais pas adoré, sans doute en raison du cadre historique, qui n'attisait pas particulièrement ni mon intérêt ni ma curiosité, et aussi pour une vague raison d'affinités. Pourtant, le temps écoulé, j'ai envie de le relire, un signe rare désormais - un signe qui souligne la qualité intrinsèque du récit, qui a su laisser son empreinte alors que les détails s'estompaient de ma mémoire, et qui donne sa place au roman sur ce blog de mes "best of".

    Ma seule expérience de l'auteur jusqu'alors avait été Tigane, un roman auquel je n'avais jamais pu accrocher et que j'avais lu péniblement ligne après ligne, page après page, sans jamais être ni émue ni passionnée. Sur des conseils avisés j'ai fait une nouvelle tentative avec "Les Chevaux Célestes" et je n'ai pas été déçue, trouvant dans ce roman toutes les qualités que les lecteurs enthousiastes de "Tigane" avaient notées.

    Pourtant, curieusement, les deux livres ont une ambiance similaire. Mais dans "Tigane" les personnages, sans être stéréotypés, étaient figés, leurs émotions, sans être clichées, étaient convenues, et l'ambiance du livre m'avait semblé bien plate, et sa lecture... poussive.

    "Les Chevaux Célestes" est d'un tout autre tonneau à mon avis, avec une écriture plus mature, et possède une personnalité qui échappait complètement à "Tigane".

    Cette conclusion est bien entendu le fruit de l'analyse que j'en ai fait pour expliquer ma divergence d'opinion entre ces deux lectures, et non pas un jugement absolu !

    Enfin, je n'ai pas encore eu l'occasion de feuilleter ce roman en version française mais, étant le soin habituel apporté par l'Atalante à ses traductions, je pense que la qualité ne peut qu'être au rendez-vous !

     

     

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  • 13569581

     

                       Éditeur en VO : Ace                                       Éditeur en VF : Bragelonne

    Paru le 2/07/2013 (après une auto-édition)                         Paru le 18/06/2014

                             592 pages                                                                672 pages

                                                                                             Traduction : Maxime le Dain

     

    Il est difficile de louer ce livre, pourtant exceptionnel, que je m'apprête à relire une troisième fois, avec dans aucun doute le même plaisir et la même émotion, avant de découvrir le tome 2, "Toxer Lord" qui sort tout juste en VO.

    Le thème de départ sonne comme un classique et rien d’ébouriffant ne vient frapper le lecteur dans ce récit de fantasy, lent sans lenteur, profond sans fioriture et passionnant sans esbroufe.

    De plus, s'il m'avait été succinctement présenté, comme l'apprentissage d'un guerrier dans un monde de fantasy classique et plutôt impitoyable, je n'aurais sans doute pas été tentée de le lire.

    Par chance, je l'ai lu "en aveugle", suite à une recommandation, et cette lecture a été directement propulsée en haut de mon best off, tous genres confondus, événement qui m'a confortée dans ma conviction qu'un livre peut toujours nous surprendre !

    Les premiers notes de ce livre ne peuvent manquer d'évoquer Le Nom du vent de Patrick Rothfuss. Pourtant, il serait dommage de comparer les deux romans, ou alors peut-être comme un exercice développé par deux élèves tout deux brillants mais très différents. Bien sûr, Blood Song n'a pas le panache, la verve et l'insolence du Nom du Vent, mais sous des dehors plus sobres, ce roman possède des qualités intrinsèques de justesse, d'humanité et d'authenticité remarquables.

    Le Nom du Vent m'a charmée, mais Blood Song m'a émue...

    Très curieusement, car les deux livres n'ont presque rien à voir, Blood Song a rejoint dans mon ressenti une lecture ancienne qui m'a beaucoup marquée, l'histoire d'une petite fille donnée en apprentissage de la dentelle, qui subit une enfance tronquée, dédiée à un dur labeur, et qui grandit pour devenir une jeune femme hors du commun : La dentellière d'Alençon. Les qualités de ces deux livres, pour leurs personnages, le déroulé de l'histoire, l'authenticité, la volonté de crédibilité historique, me paraissent très proches, et leurs traitements très similaires malgré toutes leurs disparités.

    Il est très difficile de faire vivre avec crédibilité un personnage parfait, du moins sans avoir recourt à la dérision (ou l'auto-dérision). Pourtant, avec Vaelin, Anthony Ryan réussit ce miracle. Je ne sais pas si plus d'une poignée de personnages, au court de mes lectures, m'ont autant touchée que ce petit garçon, arraché à sa famille sans explications et soumis à la vie impitoyable du Sixième Ordre de la Foi, celui qui dédie ses hommes à la guerre.

    L'auteur a le soin de gratifier son personnage de petites faiblesses : chacun de ses Frères les plus proches excelle dans un domaine où lui n'est que brillant, son cheval est une teigne qui ne s'adoucira jamais, sa gaucherie de jeune homme à l'hygiène basique, lors de son stage au sein de l'ordre des soins, le desservira, etc. De petits détails, qui ne masquent pas l'étendue de ses qualités, mais qui donnent une personnalité attachante à ce personnage pétri de qualités de noblesse.

    Les prémices m'ont inquiétée. L'ambiance de l'école semble excessivement rude, à la limite de la cruauté. Pourtant, très vite on devine que les maîtres, parfois des hommes brisés, et toujours des survivants, n'ont qu'un but alors qu'ils éduquent d'une main souvent brutale les garçons qui leur sont confiés : leur survie à long terme. Et si les enfants l'ignorent, se contentant de se serrer les coudes en profitant des rares avantages de leur condition (une nourriture pléthorique, une appartenance à une confrérie, et enfin l'amitié), le lecteur, tout comme Vaelin (alors qu'il compare les années écoulées au travail de fabrication d'une lame) le comprendront peu à peu :

    "Sollis [un de leurs maîtres] ne s'adoucissait pas ; c'est bien eux qui s'endurcissaient. Ils nous a martelés, comprit-il. Il est notre forgeron."

    On est également surpris de comprendre que ce cadre de vie si fermé qu'il évoque une prison, peut être quitté à tout instant, par souhait du novice ou s'il échoue aux épreuves. Celui-ci est alors raccompagné au dehors, et gratifié de quelques pièces d'or. Cette perspective, d'abord rassurante, devient peu à peu une hantise, alors que les années s'écoulent et que le Sixième Ordre façonne ses Frères, les fidélisant par la dureté même de son enseignement.

    La première partie (après une introduction un peu aride, qui annonce le reste du récit en flash-back - j'ai beaucoup plus apprécié ce court passage lors de ma relecture) dédiée à l'enfance de Vaelin au sein du Sixième Ordre, a le charme des récits initiatiques, avec l'intensité d'un quotidien ponctué d'évènements dramatiques. La personnalité de Vaelin évolue tout en douceur, de celle d'un petit garçon intelligent et sensible à un jeune homme réservé, empathique, déterminé et brillant : les Frères qui survivent à l'intégralité de leur formation au sein de l'Ordre guerrier sont les meilleurs. Il est d'ailleurs très satisfaisant de mesurer régulièrement l'impact de leurs incroyables capacités à travers les réactions de l'entourage extérieur.

    Ce roman a en effet une qualité infiniment romantique : non pas au sens de la romance (quoiqu'il en existe une, se dessinant peu à peu, avec encore ici une justesse, une authenticité et une émotion remarquables) mais au sens fondamental du terme.

    Il est vraiment enthousiasmant de suivre les aventures des jeunes gens, et de Vaelin en particulier, que ce soit dans les petites choses de leur quotidien ou les grandes de leurs exploits. Cette vision intérieure de la naissance d'un héros est très satisfaisante et permet un attachement infaillible au personnage de Vaelin.

    De même, avoir accès aux pensées du jeune homme, alors que celui-ci apparait comme un implacable combattant, austère et effrayant, participe à cette jubilation (curieusement d'une manière très semblable à celle employée dans les délicieuses romances historiques).

    Quant à la vision de sa personne par l'ennemi (celle offerte dans le prologue), elle m'a puissamment évoqué le personnage du père de Miles, dans les premiers livres de l'inoubliable sage Vorkosigan de Loïs McMaster Bujold, alors qu'Aral Vorkosigan est connu sous le nom du "Boucher de Komar"... (La Saga Vorkosigan intégrale, et son premier tome : "Chute libre ; L'honneur des Cordelia ; Barrayar").

    Les amateurs de gloire guerrière seront satisfaits : les actes de bravoure et les combats sont fréquents et ne nous épargnent pas. Pourtant, contrairement à bien des récits de ce genre, le roman ne fait pas l'apologie de la guerre, pas plus que son procès. Tout au long du récit, Vaelin réfléchit à la dualité de sa vocation imposée : défendre les faibles est noble, et il a appris à le faire à la perfection, mais tuer est une abomination, qui le détruit peu à peu. Un point de vue féminin, celui d'une jeune femme appartenant à l'ordre des soins, met régulièrement un contrepoint à cette réflexion en montrant un dévouement opposé : soigner et ne jamais ôter la vie, même indirectement.

    D'une façon plus générale, une réflexion sur l'injustice du destin de ces enfants, façonnés inlassablement et brutalement pour devenir des machines à tuer, est menée tout au long du roman. Bien des Frères n'en sortent pas indemnes, et les profils psychologiques des contemporains de Vaelin, mais aussi de leurs maîtres, en sont l'illustration permanente.

    Cette démonstration m'a pleinement convaincue, là où un classique encensé de tous, "La stratégie Ender", d'Orson Scott Card, m'a déçue au point d'en abandonner la lecture.

    Les personnages sont d'ailleurs tous excellents. Les rapports entre ceux-ci sont tout en finesse, sans aucun raccourci facile, aucun stéréotype, là encore l'authenticité est parfaite. Les psychologies de certains personnages, comme celle du roi, ou de sa fille, sont très subtils, et participent au déroulement d'une histoire complexe mais jamais compliquée.

    Enfin, le contexte "fantasy" est intéressant sans être omniprésent. Il n'apparait que peu à peu, comme toile de fond à la vie de Vaelin, et l'on ne comprend que tardivement comment de nombreuses petites choses disséminées ça et là se lient pour former une intrigue cohérente, qui se forme et se dénoue dans la dernière partie, pour clôturer ce livre et annoncer sa suite.

    J'ai particulièrement apprécié l'idée d'une Foi puissante, fanatique même, sans Dieu : ces croyants croient en l'au-delà et en la puissance des défunts.

    Mais j'aurais failli à ma tâche si je vous laissais entendre que ce roman est sinistre ! S'il est poignant et nous livre une réflexion juste et profonde sur l'art de la guerre, il est également passionnant, distrayant, émouvant et souvent emprunt d'une malice touchante. Par toutes ses qualités, je crois ce livre capable d'unifier les foules, et de plaire à un lectorat très étendu. Je suis ravie de le voir enfin traduit !

     

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                 Éditeur en VO : Del Rey                                           Éditeur en VO : Panini Books 

                         Paru le 12/02/2013                                                      Paru le 18/06/2014

                                     320 pages                                                   Collection Éclipse - 400 pages                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                    Traduction : Jean-Marc Ligny

    Il est désormais bien rare que je sois autant enthousiasmée par une lecture, au point d'avoir besoin d'en faire le deuil une fois le livre refermé et continuer à y penser avec plaisir et fascination.

    Karen Lord, avec ce roman, a répondu à un espoir que j'estimais vain, celui d'offrir une variante dans un genre déjà bien rebattu (la science-fiction dans ce roman précis) décision apparemment audacieuse voire impie aux yeux de bien des lecteurs, mais qui me parait pourtant l'évidence...

    La variante dont je parle est de tout simplement raconter l'histoire de personnages sous fond de contexte SF, plutôt que de présenter en profondeur un monde SF à l'aide de ses personnages, souvent pâlichons, peu crédibles, globalement oubliables.

    Bien sûr, cela Loïs Mc Master Bujold l'a déjà fait avec brio à travers sa fabuleuse sage des Vorkosigan, et son inoubliable Miles, mais elle a également proposé là un space-opéra riche en action et rebondissements spectaculaires, permettant certainement l'accroche de lecteurs à la recherche d'une lecture SF "standard".

    Ici c'est tout de même assez différent : Bien que le monde SF de l'histoire ne soit absolument pas chiche, présentant plusieurs aspects très décalés qui font le lit des différents rebondissements du récit, sa présentation pourrait frustrer voire agacer un lecteur aguerri du genre, celui qui estime indispensable une cohérence rapide et surtout complète du monde - l'élément central du livre selon sa définition. En ce qui me concerne, la quasi exclusivité des mes questionnements avaient trouvé une réponse à la fin du livre, ce qui me suffit largement, n'ayant pas besoin d'un cadre parfaitement propre et net pour apprécier l'évolution du récit. Ici la priorité va en effet aux personnages, à leurs relations, leurs évolutions psychologiques, leur quotidien... Ce roman est l'histoire des personnages, pas l'Histoire de leur monde !

    Les thèmes généraux SF sont classiques : l'humanité vit désormais éparpillée à travers l'espace, sur un nombre important de planètes joignables entre elles par voyages spatiaux. Un flou demeure durant presque tout le roman (une explication mi-figue mi-raisin est cependant offerte à un moment) sur l'origine des quatre catégories humaines qui semblent composer, entre elles et le produit de leurs métissages, la nouvelle humanité. Ces différentes "espèces" aux pouvoirs psychiques marqués (télépathie, empathie voire même télékinésie) ont-elles comme origine une variation génétique spontanée des humains terriens ? une variation génétique acquise ? des origines extra-terrestres ?

    Loin d'être agacée par ce manque d'explication claire, j'ai apprécié cette manière de raconter l'histoire en plongeant directement le lecteur dans le bain, dans un autre quotidien, d'autres préoccupations, des préoccupations quotidiennes de personnes à la fois différentes et très humaines, par le petit bout de la lorgnette de la narratrice.

     Le thème central du roman est simple dans sa définition : le peuple des Sadiris, considéré comme l'expression humaine la plus brillante (en particulier par la possibilité que les Sadiris ont, pour ceux qui le choisissent, d'unir leur esprit à un vaisseau spatial pour ne former qu'un tout, soit un pilote exceptionnel) ont été éradiqués par une attaque mystérieuse de leur planète, devenue invivable. Les survivants sont rares, des pilotes de vaisseaux, des ambassadeurs, des scientifiques, des personnes en vacances sur d'autres planètes, etc.

    Une délégation est envoyée sur Cygnus Beta, une planète reconnue pour son mélange racial, afin de tenter de retrouver, de sélectionner génétiquement puis de convaincre des personnes (essentiellement des femmes, les derniers Sadiris étant principalement masculins) de bien vouloir convoler avec les survivants, de manière à ce que la race supérieure des Sadiris ne s'éteigne pas.

    La génétique et les expressions psychiques des différentes races humaines sont au coeur de ce projet scientifique, mené avec la bénédiction du gouvernement Cygnien. Une équipe est formée, mêlant des Sadiris bien sûr, des scientifiques en particulier, mais aussi des professionnels natifs, des Cygniens aux origines métisses et aux aptitudes psychiques aussi variées que discrètes. Si discrètes d'ailleurs que l'on est autant surpris que fasciné d'en découvrir l'impact, au détour d'une situation qui nous avait d'abord paru familière...

    L'équipe part ainsi pour un long périple autour du monde de Cygnus Beta, pour une quête scientifique aux orientations anthropologiques, parcourant des terres parfois hostiles et faisant d'étranges découvertes. Les péripéties sont passionnantes de bout en bout.

    Au court du récit l'auteur ose parfois de petites allusions quasiment "anachroniques", avant que l'on ne comprenne que notre culture a été soigneusement conservée, nous plongeant dans une certaine perplexité : ce monde est-il proche du nôtre dans le temps ou bien est-ce une uchronie ?...

    Ce roman est très nettement féminin. Par ce terme, je ne veux pas dire "pour filles", bien que je pense que toute lectrice amatrice des romans à romance centrale et à tonalité littéraire (les Jane Austen, les Victoria Clayton ou même les romances contemporaines de qualité en mode réaliste) seront les premières à l'adorer.

    Pourtant, décrire ce roman comme une romance serait une faute d'appréciation. Les relations sociales forment l'enjeu du récit, à travers les relations de couples, c'est vrai, mais finalement très peu, laissant la part belle aux interactions entre gens civilisés, mais aux langages, manières, valeurs, religions, symbolismes très différents.

     Bon, les lecteurs qui attendent de l'action avec un grand A en permanence, des combats spatiaux, des découvertes de grande envergure, l'exploration de l'espace, etc, n'y trouveront sans doute pas leur compte. De même les lecteurs, en particulier les lectrices, qui n'apprécient leurs personnages féminins que forts en gueule, agressifs, à la sexualité débridée et sans complexe, n'apprécieront sans doute pas à sa juste valeur le personnage mesuré, travailleur, à la fausse apparente simplicité qu'est la narratrice, Grâce Delarua.

    Quand aux autres, ceux qui aiment l'originalité dans leurs romans, qui apprécient la SF au sens large, sans en avoir d'attentes trop précises et qui pensent que des personnages réussis font les trois-quart d'un bon roman, je ne peux que les encourager à lire ce livre étonnant (je pense en particulier à tous les amateurs de la série des Miles Vorkosigan).

    D'une manière générale le récit est tranquille, sans lenteurs ni longueurs, plein d'une subtilité étonnante, d'un soin infini aux détails, en toute légèreté et d'une extrême fluidité. Le ton est magnifiquement tonique et positif, une rareté de nos jours ! Pourtant le point de départ du récit est terrible, celui d'une catastrophe ayant décimé une planète entière, n'épargnant que les habitants partis en mission, en voyage ou en vacances. L'impact psychologique, si traumatisant, d'un anéantissement presque total non seulement d'un monde mais d'une race, les Sadiris, est le point névralgique de l'histoire. Le court préambule, qui met en place Dllenahkh, donne la note principale du roman. C'est de ce début que provient l'extrait proposé par le site, un choix douteux pour présenter le roman, dans la mesure où il n'offre pas de reflet fidèle de l'ensemble du récit. 

    En effet, la tonalité générale (qui m'a beaucoup rappelé cette autre extraordinaire lecture, The Thinking Woman's Guide to Real Magic dans un contexte pourtant très différent) reste très positive, tournée vers l'avenir, grâce à la personnalité de la narratrice. Car si le texte présente de nombreux brefs passages à la troisième du singulier, centrés sur Dllenahkh, comme l'est le prologue, l'ensemble du récit est à la première du singulier, raconté par Grâce Delarua, une jeune femme fascinante.

    Je me plains souvent de l'emploi de cette première personne du singulier ! Mais c'est qu'il est si souvent frelaté, donnant naissance à une ambiance surjouée, facile et pleine d'émotions factices. Ici l'authenticité est parfaite.

    Grâce s'adresse à quelqu'un alors qu'elle raconte les deux années écoulées. A un très bon ami, quelqu'un qui connaît le monde dans lequel elle évolue, au lecteur comprend-t-on finalement. Pas d'infodump ici, pourtant aucune frustration non plus, une qualité de lecture constante et splendide. Pas d'épanchement sentimental non plus, il est d'ailleurs étonnant de comprendre, au détour d'un événement, d'une phrase, d'une révélation, que Grâce, sous son abord enjoué et confiant, reste en fait pudique, réservée, ne dévoilant pas grand chose de ses sentiments.

    Par ce côté subtil et si réaliste à mes yeux, cette faute fréquente de croire qu'une personne expansive n'a pas d'ombre ni de sentiments secrets, on retrouve l'Art de Victoria Clayton, qui ne laisse entendre les sentiments de ses héroïnes qu'en toute fin de chacun de ses romans.

    Grâce est en effet extraordinaire : on la croit d'abord simple, un peu naïve, enthousiaste et très jeune. Mais petit à petit on comprend qu'il s'agit d'une jeune femme d'âge moyen, d'une vive intelligence et de capacités inhabituelles. Un passage dans sa famille nous permet d'en apprendre beaucoup plus sur elle, balayant d'un coup toutes nos convictions. On découvre alors une personnalité bien plus complexe que sa nature solaire et énergique ne laisseraient penser, un passé pesant, tout en nous montrant par l'exemple l'impact pratique des différentes aptitudes des groupes humains qui évoluent dans l'histoire.

    Quand mes réticences sur l'emploi de la première personne sont vaincus, c'est que je suis tombée sous le charme du narrateur et ce roman n'échappe pas à la règle : Grâce, une jeune femme assez quelconque, robuste, pragmatique et capable est infiniment sympathique et touchante. 

    Dllenahkh, que l'on ne découvre que par un éclairage indirect, très semblable à celui employé pour les personnages de Victoria Clayton, encore une fois, possède le même charme des hommes aux qualités intellectuelles indéniables, dont la maîtrise permanente masque une sensibilité profonde. Mais où la SF intervient est dans la manière inhabituelle des Sadiris de masquer leurs émotions (des commentateurs américains comparent les Sadiris avec les Vulcains, ah oui il y a de cela !) non par insensibilité, mais pour la simple raison que ce peuple, qui utilise la télépathie naturellement et en permanence, doit se contrôler sans cesse, paraissant ainsi peu expansif aux regards des autres races. Ce contrôle de leurs émotions est permanent grâce, en particulier, à la méditation quotidienne à laquelle ils s’astreignent ; et s'ils peuvent nous sembler froids et insensibles au début du roman (un peu comme les elfes en fantasy, ce n'est d'ailleurs pas le seul clin d'oeil) le récit ne tarde pas à nous prouver le contraire.

    La relation qui d'établit lentement, dans un contexte purement professionnel et à travers de nombreuses péripéties, ne trompe pas le lecteur, qui devine comment Grâce, et peut-être aussi Dllenahkh, se raccrochent à l'illusion d'une relation purement amicale, alors que leur intimité se renforce avec une force, une profondeur et une émotion pleine de retenue et de sensibilité. 

    Cela semble très romanesque, et même romantique, et cela l'est certainement, du moins pour les lecteurs appréciant d'une part une forme de réalisme dans la naissance de l'amour, assorti d'une bonne dose d'humour, et d'autre part la délicieuse et glorieuse idée d'utiliser les paramètres d'une réalité décalée pour y faire vivre une histoire passionnante et émouvante... Ici en SF, mais je pense encore à Loïs Mc Master Bujold qui a tenté brillamment le même exercice en fantasy avec les romans suivants : The Curse of Chalion, Paladin of Souls, The Hallowed Hunt et enfin la série en 4 tomes qui commence avec The Sharing Knife: Beguilement. 

    Ce roman inclassable trouvera j'espère ses lecteurs, qui seront à chercher sans doute en premier lieu parmi ceux qui pensent ne pas apprécier la Science-Fiction : cela ne sera peut-être pas facile !

    J'ai le plaisir d'annoncer qu'une suite est attendue pour ce livre, début 2015, avec comme personnage principal le neveu de Grâce et l'occasion pour nous d'explorer un peu plus l'impact des particularités étonnantes de ces néos-humains sur cette société futuriste : The Galaxy Game.

    Autre excellente nouvelle, une traduction française est prévue, qui sera proposée dans la collection Eclipse de Panini Books, en 2014 je crois.

    Je suis aux anges de constater que certains éditeurs osent l'originalité, en présentant des romans qui osent eux mélanger sans vergogne les genres, se dédouanant des ridicules obligations à respecter des règles édictées par l'usage, et certainement aussi par le besoin compulsif que nous avons tous à classer nos lectures selon ces dits-genres en question !

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